Le sujet bouillant de l’influence.

Du buzz à l’influence, une simple histoire de manipulation ?

Votre objectif : 20 000 followers. Des gains de 5000 € par mois.
Si vous êtes présents sur les réseaux sociaux, vous êtes peut-être amusé de cette promesse, proposée par la société Ambaza, la première école d’influenceurs française. Au-delà du buzz, plutôt bad, de l’annonce de l’ ouverture de cette formation de 28h pour 1 200 euros, reconnaissons l’ampleur de la tendance et de l’intérêt pour l’influence dans toute son envergure.

Récemment, Bloomberg a partagé un sondage. Il en ressort qu’un européen sur dix est prêt à quitter son emploi actuel dans les six prochains mois, pour tenter de faire carrière de influenceurs sur TikTok.

Pour reprendre les mots de Cyril Attias, fondateur de l’une des toutes premières agences de social média, en 2020 : « l’influence digitale n’est pas un sujet à la mode, c’est une vraie transformation sociétale, de consommation et d’usages intergénérationnels. » Et dans cette amplification, le rôle de la viralité technologique. C’est un rôle essentiel ! Les plates-formes en ont permis l’avènement. Considérer qu’avec une seule publication sur une publication sur une plate-forme digital, les prescripteurs peuvent partager une information information, un avis politique, recommander un produit ou un service, auprès de milliers voire des millions de personnes selon la viralité. Et ce, en quelques secondes. Nous sommes presque tous impliqués.

62 % des consommateurs réagissent au moins une fois par jour aux publications d’un leader d’opinion.

Derrière ces activités fructueuses, se cache un vice, un concept moins vertueux, celui de la manipulation : comment situer la frontière entre l’influence et la manipulation?
Nous y sommes ! Et c’est Robert B. Cialdini, psychologue social américain, qui détaille ces frontières : il explique pourquoi certaines personnes sont douées d’un remarquable talents de persuasion, et comment il est possible de les battre sur leur propre terrain. Il délivre donc sept armes de persuasion dans un large panorama de technique et théorique en tout genre, pour obtenir quelque chose de nouveau, sans que nous nous y opposions. Ces moyens peuvent se mettre en place grâce a notre dangereuse tendance à nous laisser influencer. Car nos comportements humains se répètent, automatiquement et fréquemment, et le virtuel valide ce postulat.

Comment, dans cette infobésité pouvons-nous distinguer les contenus à visée manipulatoires ?

Le recours à l’influence n’est que la partie émergée est visible de tout un champ de propositions. Or, à la capacité d’influence, répond la compétence d’écoute, d’audit des flux et des conversations des communautés. On propose ici le triptyque de l’intelligence économique.
Veille, production et influence. Car selon Carlo Revely, chercheur en sciences de l’information à l’université Paris X et auteur de plusieurs articles sur le sujet, « tout organisme doit apprendre à maîtriser les flux informationnels avant de prendre une quelconque décision stratégique ».
Grâce au partage, aux commentaires et aux like sur les plates-formes, l’écoute des réseaux sociaux permet d’identifier les signaux faibles. La détection, de ses signaux est le point fort des résultats de la veille. Cette notion de signal faible remonte aux années 70. Mis en perspective dans un contexte précis, ils peuvent s’avérer extrêmement instructifs et apporter un décryptage et des analyses positives pour nourrir les stratégies économiques des entreprises et les soutenir dans leur performance.

Cela apporte la vision de « comment s’organise le monde autour de nous, la société connectée ?  » Et c’est un monde qui évolue très vite.

Cette écoute, cette inférence sociale, est maîtrisée par quelques agences, avec des outils technologiques élaborés sur-mesure, qui permettent de découvrir 10 à 100 fois plus de contenus et de personnes pertinentes, qu’une recherche par mot-clé. Or la puissance de la boucle, peut être un formidable moyen de glisser vers la manipulation, et la désinformation voire, la surveillance. Cette écoute active est donc le terrain de l’influence mais aussi des risques et beaucoup plus forts, est porté par des entreprises puissantes ? – Oui, et d’autres business très profitables , se font jour.

Mediapart a dénoncé récemment l’une des plus grandes entreprises de manipulation de l’information intervenue en France, et révèle tout un écosystème qui partage les démarches pour promouvoir les intérêts de leurs clients mais aussi dézinguer la concurrence. Leur méthode : tromper le public en publiant des articles semblant rédigés par des journalistes indépendants, sur des sites et des plateformes ressemblant plus ou moins à ceux de journaux ou médias. Dans le cadre de mes activités de communication d’influence, j’ai moi-même été approchée. A l’issue de l’entretien, je reconnais ne pas avoir du tout identifié l’usage dévoyé et répréhensible de leur offre de collaboration. J’avais, comme à l’accoutumée, carte blanche pour rédiger les articles sur mes sujets de prédilection et la possibilité de signer les billets auxquels j’adhère. J’ai toutefois refusé leur proposition , car ce procédé bien que confortable ne répondait ni à mon éthique, ni à mes besoins d’investigation n conclusion, le zoom est souvent fait sur l’influence, mais cet angle sape les étapes précédentes.

Le déroulé de l’équation gagnante serait, pour toute entreprise, la courbe vertueuse : Veille et écoute, inférence sociale, analyse, production, et en cerise sur le gâteau, l’influence !

Chronique issue du podcast Trench Tech, avec Laurence Devillers :
« IA et robots, il faut voir comme ils nous parlent !  » https://podcast.ausha.co/trench-tech/laurence-devillers-ia-robots-il-faut-voir-comme-ils-nous-parlent

« Notre attention, sous écoute. »

Les plates-formes mondiales, Facebook, TikTok ou Twitter, ont ouvert l’ère de l’économie de l’attention.

Commençons par nos pratiques d’internautes : 62,5 % de la population mondiale utilise Internet et sur les réseaux sociaux il y a 4,62 milliards d’utilisateurs actifs.

Ces chiffres, écrasants, et croissants indiquent qu’il serait impossible de revenir en arrière. Car le Web est intégré dans tous nos processus économiques, politiques, sociaux. Nous passons en moyenne 6h58 par jour sur Internet, le zoom est souvent opéré sur le temps d’écran, mais cela n’a aucun sens.

Faisons un parallèle avec l’alimentation : devant l’abondance de contenus, notre consommation numérique serait comme évaluer la nourriture consommée à son poids. 5 kg de salade verte n’équivalent pas 5 kg de frites, vous en conviendrez.

Pour Google et les Gafa, le défi et la captation de l’attention, c’est le capital recherché par les plates-formes. Notre niveau d’attention est une source de valorisation des contenus des messages publicitaires

Quelles sont les tactiques de ces plates-formes pour retenir les internautes ?
Une fois que nous sommes connectés, c’est un flux continu, un fil d’actualité sans fin entre les réseaux sociaux, les mails, les SMS.

Une illustration :les applications téléchargées sur nos smartphones, nous privent des signaux d’arrêt nous indiquent qu’il est temps de passer à autre chose. Inversement, la lecture d’un journal ou le visionnage d’une série, une fois les pages du journal tournées, nous parvenons au bout de l’édition. Une fois l’épisode de la série terminée, même si vous enchaînez sur le suivant, il comporte une fin.

Les notifications sont l’une des fonctionnalités et plus stressantes de nos smartphones, c’est pourquoi nous sommes maintenus en alerte permanente, lorsqu’elles sont activées.Parlons aussi des récompenses aléatoires prodiguées sur les plateformes

Ces récompenses sont efficaces lorsqu’elles sont intermittentes et non prévisibles. Le résultat attendu est relié à une part d’incertitude. Afin que nous soyons soit déçu, soit émerveillé devant ce qui s’affiche sous nos yeux. C’est d’une efficacité addictive redoutable.

Il en découle de la dépendance à ses nombreuses interfaces et services.

Les plates-formes, les réseaux sociaux nous apprennent à devenir accro.
Ces techniques employées se basent sur nos besoins anthropologiques ?

Oui, car dès la 10e seconde, il nous faut un nouveau stimulus, une autre recommandation car notre contexte mental est remis a zéro. Parmi nos besoins primaires se trouve aussi celui de la reconnaissance sociale. C’est un besoin d’appartenir à une communauté. L’ego est également l’un des piliers de notre motivation Cela permet ensuite aux plates-formes de produire et développer des modèles prédictifs pousser de plus en plus performant , pour parvenir à optimiser cette captation de l’attention.

Et au passage, les plates-formes en profitent pour collecter des données personnelles ? Oui, comme l’intelligence artificielle de Facebook, qui manipule des trillions de points de données par jour, réalisant plus de 6 millions de prédictions de comportement, à la seconde. Tout ceci va très loin : même les moteurs de recherche construisent des frontières de l’information en personnalisant les résultats en fonction de notre géolocalisation, de notre langage etc.

Alors que nous sommes convaincus que nos explorations sur ces moteurs de recherche sont non exhaustives, et ouvertes. À ce propos, le site « search atlas » permet de comparer les résultats à travers différents pays d’une même requête, sur Google

Avec ce constat affligeant, comment réagir ?
Rétrospectivement l’apprentissage du Web a été pensé pour qu’il se réalise instinctivement. Avec un regard distancié, nous réalisons qu’un apprentissage accompagné avec méthodologie s’impose pour notre société.

La première étape est de reconnaître que la source d’une distraction est 90 % du temps à l’intérieur, et non à l’extérieur de nous, observe cet expert, en mécanismes d’addiction : Il ne s’agit pas de dénigrer notre comportement, mais il s’agit d’opérer sa propre régulation plutôt qu’un sevrage brutal. Individuellement posons-nous la question :

  • En nous connectant, de quoi avons-nous vraiment besoin ?
  • De quoi avons-nous envie d’être averti ?

Nous devrions prendre l’habitude de préciser nos intentions avant tout de connexion Puis, évaluer la qualité de l’expérience. Cela concerne l’éducation à la consommation de l’information, c’est la redéfinition nécessaire de nos usages d’internautes.

Plutôt que d’être défensifs, soyons acteurs responsables en postant intelligemment. Sans engager nos enfants, par exemple, en évitant de publier les échographies ou les photos de nos bambins. Au-delà d’un modèle économique, Internet est un modèle civilisationnel. Qui a un impact fondamental sur le fonctionnement de la démocratie : on peut légiférer, taxer, mais nous devrions nous sentir responsable.

Podcast TrenchTech avec Hélena Poincet : » cyber-sécurité la menace fantôme »
https://podcast.ausha.co/trench-tech/cybersecurite-la-menace-fantome

Les travailleurs du clic sont les invisibles du numérique, un phénomène méconnu

On les dit «invisibles » : en France 260 000 personnes, microtravailleraient.

Derrière nos applications, nos sites Web, Surtout nos algorithmes des milliers de travailleurs s’activent dans l’ombre pour faire fonctionner le mot numérique.

Au niveau mondial il serait entre 45 et 90 millions. Ce sont les clic workers. Ça sonne bien, mais cela n’évoque pas vraiment le travail et ce marché de la gig economy, qui signifie littéralement l’économie des petits boulots. Elle désigne tout travailleur indépendant ou auto entrepreneur, payé à la tâche.

Leur profil ? Des femmes en majorité, 56 %, entre 25 et 44 ans.

Plus précisément, ces clic workers nettoient des bases de données, modérer des contenus, évaluer des applications en ligne, cliquer sur des liens, classer des mots-clés, légender une photo, répondre à un questionnaire, etc…

Des petits boulots réalisés entre 10 secondes et 15 minutes en ligne, effectués sur un ordinateur ou un smartphone, et qui rapporte quelques centimes voire quelques euros. C’est une infinité de micros taches qui contribue à améliorer les systèmes d’intelligence artificielle. Car pour fonctionner, cette technologie doit être nourrie par d’énormes bases de données, conçues par des humains, à partir desquelles elles apprennent. Pour le moment, à défaut de se nourrir, ses employés nourrissent les data.

Un clic worker témoigne sur cette tâche qui consiste à jouer à une sorte de jeu vidéo. Les micros travailleurs doivent se diriger vers les personnages aux prénoms d’origine française, en appuyant sur la touche « avancer », et s’éloigner des prénoms d’origine maghrébine, en appuyant sur la touche « reculer ».

Amélie est modératrice, et modère du contenu toute la journée. Elle se heurte à la violence des images de meurtre, suicide, racisme. Le pire pour elle, mais je ne la citerai pas car c’est humainement intolérable. Ce qu’elle voit initie des risques de stress psychologique et traumatique. Qui ne sont pas pris en charge ni même reconnu par les plates-formes. Ces travailleurs du clic sont payés uniquement sur les commandes. Par exemple, si un client ne valide pas la micro tâche, le travailleur n’est pas rémunéré. Beaucoup d’entre eux, vont jusqu’à se créer des alertes en pleine nuit, pour maximiser leur chance de décrocher une mission.

Sans jamais avoir la certitude d’être rémunéré puisqu’une tâche inachevée dans les temps est remise sur le marché.

Ce sujet sensible un réveil aussi les arnaques dans son approche commerciale. Présenté en 2018 comme entièrement automatisé, l’assistant vocal Google duplex était supervisé par des personnes qui écoutaient et corrigeaient l’intelligence artificielle et parfois, se faisaient passer pour l’assistant vocal, qui simulait un être humain. L’intelligence artificielle produite par les plates-formes n’est finalement pas aussi automatisée qu’il n’y paraît et bel et bien nourrie par de l’intelligence humaine, à moindre frais.

Quelles sont les conditions de travail de ces personnes ?

Les modalités de travail des clic workers ont de quoi inquiéter : le temps est limité pour aller aux toilettes : cinq minutes, vingt minutes pour aller déjeuner. De plus lorsque l’on travaille pour certaines plates-formes comme Google, les témoignages sont en mode anonyme. Il leur est même interdit de travailler dans des lieux publics. La mission peut être stoppée par l’entreprise ou l’employé viré, sans préavis, Il n’y a pas de contrat mais un simple accord de participation voire, la seule adhésion aux conditions générales d’utilisation de la plate-forme. Le tout dans une grande opacité. Généralement les travailleurs ne savent pas pour qui ils agissent.

Dans cette affaire ce sont les plates-formes les gagnantes ?

Derrière les algorithmes d’Uber, Facebook, Deliveroo, Google, et d’autres comme Amazon Mechanikal Turk, la croissance et de 25 à 30 % par an. De fait, ces travailleurs du clic sont majoritairement issus d’Inde, des Philippines, du Pakistan, du Bangladesh, suivi des États-Unis et de l’Europe de l’Est. La grande difficulté pour réguler le micro travail, réside dans sa dispersion géographique et le fait que peu d’individus travaillent à plein temps. Il demeure, a minima, une régulation. Par l’application de lois existantes. Mais il n’y a pas de voix collective pour défendre leurs droits. Du côté du pays scandinaves, on trouve l’expérimentation d’une nouvelle forme de modèle : la flexi sécurité. Une libéralisation totale des contrats et des conditions d’embauche ou de licenciement.

Il y a tout à faire pour encadrer et ne pas amplifier la paupérisation, quelles perspectives pour conclure ?

Pour certains prospectivistes, la gig economy est une phase de transition du marché de l’emploi. Avant l’ère du transfert, ou l’on cumule des missions différentes pour des employeurs différents. Ces plates-formes opèrent dans une zone grise qui n’offre aucune des protections de nos sociétés au travail : assurance maladie, retraite, chômage.

Dans ce domaine, l’essor de la tech et des plates-formes se fait au détriment de la qualité de la vie humaine par la prolifération de nouveaux travailleurs pauvres, partout dans le monde, y compris en France. Selon un sondage Full Factory 40 % de ces personnes ont un CDI, 71 % d’entre elles travaillent à temps plein, et 22 % vivent sous le seuil de la pauvreté. Il faut souhaiter, par la visibilité des dangers et de cette précarité, d’une prise de conscience politique, et des outils juridiques.

Une chronique Patch tech, extraite du podcast TrenchTech, avec Nicolas Arpagian : https://podcast.ausha.co/trench-tech/guerre-tech-aux-frontieres-du-reel

La loi d’Amara, donne des perspectives ébouriffantes sur l’innovation !

Et vient éclairer quelques domaines comme celui de la Tech. En effet, d’une technologie à l’autre, certains principes voient le jour comme celui de la loi de Amara. RoyAmara, a fondé l’ « Institut pour le futur », think tank de la Silicon Valley en 1968 : « Nous avons tendance, à surestimer l’incidence d’une nouvelle technologie à cours terme, et à la sous-estimer à long terme.. »

À quel type de technologie fait référence Amara? Prenons un premier exemple, celui du GPS. Les usages actuels était inimaginables au départ. La première phase, c’est l’idéalisation des potentialités techniques, à court terme. Le GPS a été créé dans un but précis, mais cela a été fastidieux pour arriver à des performances conformes aux attentes initiales. Cet objectif était de permettre à l’armée américaine de livrer précisément les munitions.

Une constellation de 24 satellites a été alors mise en orbite. C’est durant la première guerre du Golfe en 1991 que le GPS retrouve son objectif premier. Le système a été déclaré opérationnel en 1995. Il a fallu d’autres succès pour que l’armée admette que cette invention était utile.
En deuxième phase, aujourd’hui, le GPS a envahi tant d’aspects de nos vies que sans lui, nous serions perdus. Intégré dans l’Apple Watch, il nous géolocalise suffisamment précisément pour savoir de quel côté de la rue nous sommes. La taille, minuscule, et le prix de l’appareil, aurait été inconcevables pour les premiers ingénieurs de cette technologie.

Le robot est une autre illustration intéressante de la loi d’Amara. Car l’on peut en matérialiser l’évolution de manière visuelle et fonctionnelle. La science-fiction est le genre d’anticipation le plus à même de parler de robot. Nombre d’œuvres participent à cette soif de prophétie à travers la technologie et mêlent dans nos esprits le fantasme, et l’angoisse..

On parle de Terminator ? Non, mais de « AI intelligence artificielle » une fiction de Steven Spielberg. L’histoire d’un garçon, ou plutôt d’un parfait petit robot, adopté par une famille. Cette fiction très réussie fait émerger une multitude d’interrogations ambivalentes, cartésiennes et émotionnelles. En écho avec les cycles engendrés par la loi d’Amara. Je me rappelle que lors du premier salon de la robotique créé par Bruno Bonnell en 2010, les stands asiatiques exposaient une majorité de robots humanoïdes. Alors que l’efficacité opérationnelle de la robotique étaient déjà à l’œuvre dans les industries. Mais sous des formes moins glamour que Sofia, la gynoïde.
L’explication était simple : pour adopter la robolution, autrement dit, la révolution des robots, il fallait en passer par une représentation humaine. Avec ce paradoxe d’inventer le futur, en reproduisant les caractéristiques de l’enveloppe corporelle humaine

Isaac Asimov, s’amusait de cette peur Inspiré par le robot. Je le cite : j’y voyais une créature totalement inoffensive, juste préoccupée d’exécuter le travail pour lequel on l’avait conçu, incapable de causer le moindre préjudice aux hommes tandis que maints adultes Victime d’un complexe de Frankenstein voulaient considérer ces pauvres machines comme des créatures Mortellement dangereuses. Les techno vont vite mais l’adoption par les utilisateurs enregistre plusieurs étapes et diffèrent en fonction de leur culture, de leur religion.

D’autres sociétés remettrait en cause cette loi d’Amara, pour la robotique en particulier ?
Elle serait en tout cas à nuancer. Au Japon, au-delà du vieillissement de sa population qui le pousse à trouver des solutions d’aide aux personnes, a plusieurs années d’avance dans sa production et dans son adoption. Leur pratique du shintoïsme convoque des éléments animistes, en conséquence duquel le peuple nippon porte de l’affection aux objets auxquels il attache une âme. D’autant plus instinctivement qu’ils ont une lueur d’humanité.
Ici la technique est d’abord perçue comme une alliée. En 2010, Bruno Bonnell, écrivait : ce futur monde, peuplé de machines intelligentes et connectées est au coin du siècle. Se laisser conduire dans un véhicule autonome, ou confier son corps pour une opération chirurgicale fera partie de notre vie. Il était visionnaire.
Aujourd’hui la chirurgie robotique est une pratique de plus en plus courante. Avec l’acquisition du robot Da Vinci par différents hôpitaux, ce sont les services d’urologie de gynécologie, et de chirurgie viscérale qui sont les premiers à en bénéficier. Il permet une plus grande mobilité, une meilleure précision du geste en éliminant des tremblements de la main.
Et pour reprendre ainsi les principes de la loi d’Amara la robotique promet vraisemblablement d’autres horizons. Oui, et la technologie porté par l’imaginaire reflète bien cette loi, emmenant nos pensées dans le rêve et la magie. Puis, en retombant sur les réalités d’usage, que finalement l’adoption et les améliorations inscrivent dans notre quotidien bien au-delà des propositions initiales.


On enchaîne sur le métavers ?!

Chronique issue du podcast TrenchTech Gérald Holubowicz – Deep Fake : l’ombre d’un doute
https://podcast.ausha.co/trench-tech/deep-fake-l-ombre-d-un-doute

Pro tech ou anti tech: Peut-on les réconcilier ?

Le rapport à la technologie a des clivages majeurs, que l’on rencontre actuellement. Mais cela n’a pas été toujours le cas. Quelques chiffres ébouriffants sur l’adoption des technologies :
Il a fallu 68 ans au transport aérien pour gagner 50 millions d’utilisateurs,

50 ans pour le téléphone,

22 ans pour la télévision, deux ans pour Twitter

et 19 jours pour Pokémon Go.

Nous sommes de plus en plus adaptables, nos apprentissages sont anthropologiquement plus rapides. Sur la notion de progrès, Raphael Llorca, expert en sciences sociales, évoque ce paradigme :
« L’idée que demain sera nécessairement mieux aujourd’hui et qu’hier ». Nous avons une vision très linéaire du temps, couplée à l’idée que nous allons forcément vers un avenir meilleur. Il lui semble que nous sommes précisément en train de vivre un basculement de notre rapport au progrès..

Jusqu’au XVIIe siècle, on ne s’intéressait pas à l’avenir, mais au passé. La religion, et la pensée antique, étaient la boussole de nos actions, afin de parvenir au bonheur. C’est avec la révolution scientifique que le progrès nait. Galilée fonde l’héliocentrisme en 1610, René Descartes découvre la géométrie analytique en 1637. Cette avancée rationaliste permet aux techniques de se développer jusqu’à l’avènement de la révolution industrielle à la fin du XVIIIe siècle, en Europe.

Astronomie / Système planétaire. “Scenographica systematica Copernicani”. (Système planétaire héliocentrique de Copernic, 1510). Grav. sur cuivre, coloriée. In : Christoph Cellarius, Harmonia Macrocosmica, 1660.

Depuis, le monde a connu d’autres évolutions économiques toujours initiées par une innovation technologique. Puis ce progrès évolue au XXe siècle. Avec la découverte de l’ADN, de la bombe atomique, le premier ordinateur, la première fusée, l’ensemble des technologies NBIC, ainsi que les technologies spatiale et nucléaire.
Désormais, nous entrons dans une ère dichotomique : Jeff Bezos et les trois autres occupants de Blue Origin ont émis 75 tonnes de gaz carbonique chacun en 10 minutes. C’est l’équivalent des émissions de 16 français en une année. Ce progrès technique s’accompagne inéluctablement d’un autre paramètre, celui du déclin environnemental.

La tech fait-elle l’adhésion des Français ?

65 % des Français déciderait de vivre dans le passé si ils en avaient le choix. Pour autant 79 % des Français se montre majoritairement intéressé par la technologie et son développement. Avec la tech, on percute l’imaginaire, on lui offre d’autres dimensions. On a enfin la possibilité de faire des choses dont nos ancêtres ont rêvés. Comme résorber la pauvreté, manger à sa faim, ça, c’est très récent. Mais la tech est aussi une source d’inquiétude pour 38 % d’entre nous.

Puisque la technologie, la machine n’a pas de corps, n’a pas de désir, de sentiments, c’est à elle que l’on peut confier la rationalité, et la tâche de raisonner. Sur cette notion de rationalité, Miguel Benasayag philosophe et psychanalyste, développe la théorie d’une ère de post rationalité. Après avoir perdu la foi dans le rationalisme humain, nous nous tournons vers la foi dans le rationalisme de la machine. Mais nous risquons de préférer la donnée et le calcul, au libre arbitre. Les nouvelles technos offrent de formidables opportunités de progrès, lorsqu’elles sont utilisés comme outil au service d’ambitions éthiques, ou égalitaires. Mais lorsqu’elles sont pensées en dehors de tout projet de société, elles doivent être questionnées, remises en perspective.

Par exemple, nous avons suffisamment de quoi bien vivre, Mais qu’est-ce qui vient ensuite, après être rassasié ? On peut faire un arrêt sur images, et s’interroger. Plusieurs scénarios pour ce XXIe siècle qui révèle nos immense pouvoirs technologiques et démiurgiques avec nos positions de plus en plus fortes face à ces progrès.

Alors, deux scénarios : le premier qui consiste à penser « On va atteindre une crise de plus en plus profonde envers ces technologies ».

Et le second : les Français considèrent à 77 % que rien ni personne peut enrayer son développement. La tech a une évolution exponentielle, dans tous les domaines, en accélération avec la pandémie.

L’usage de ces tech impacte non seulement nos comportements mais aussi la société, exhorte à engager la politique, l’économie, la sociologie, l’éthique.
Et cela nous sollicite individuellement, convoquant notre libre arbitre et notre esprit critique. Afin de dessiner la société de demain.

Une chronique pour le podcast TRENCHTECH , que vous retrouvez ici : https://podcast.ausha.co/trench-tech/2042-ou-en-sont-les-femmes-dans-la-tech

Ethique, Data addiction : L’économie de l’attention.

Où l’on retrouve quelques points de la table ronde organisée par E Futura octobre 2021

Les participants :
Stefana Broadbent, Professeur à Polytechnique, Docteur en sciences cognitives
Michael Stora, Psychanalyste et fondateur de l’Ecole des Héros,
Dominique Boullier, Professeur de sociologie.
Et Bibi 😉
Modération des débats : Wladimir Taranoff

La Chine a limité à 40 minutes par jour la durée d’usage du réseau TikTok pour les jeunes de moins de 14 ans, et les jeux vidéo en ligne pour les adolescents.
95 % des films qui s’affichent sur notre page d’accueil Netflix sont des recommandations personnalisées établies selon notre utilisation de cette plateforme.

À l’origine de ces plates-formes, nous étions dans l’engouement de la nouveauté, l’utopie du partage. Mais le business modèle d’origine a évolué, et n’est plus le même. Celles-ci tablaient sur des revenus publicitaires, qui aujourd’hui se transforment en monétisation de la data, donnant lieu d’influer sur nos choix et nos décisions.

À la fin des années 90 il y a eu une baisse du chiffre d’affaires, les montants de commercialisation par les publicités stagnaient. Par notre adoption massive , notre présence accrue, les plates-formes ont réalisé la nouvelle manne financière qu’elles pouvaient obtenir en monnayant la récolte abondante de données.
Ces développements n’étaient pas anticipés ni du côté de l’utilisateur que du côté des créateurs de ces entreprises. La data est devenue l’or noir, permettant de réaliser des profilages affinés de nos typologies.

En effet, l’intelligence artificielle de Facebook récupère des trillions de points de données, pour réaliser 6 millions de prédictions de comportements à la seconde.
« Car les algorithmes travaillent sur la prédictivité de l’être humain .  » Michael Stora s’insurge : l’être humain est tout sauf prédictible. La conception de l’algorithme 0.1 est binaire, et ne définit pas l’être humain. »

Par l’injonction de l’immédiateté, chaque clic déclenche une réaction, les plates-formes rivalisent. Cette dynamique nous entraîne dans ce mouvement de FOMO Fear of missing out, une anxiété qui pousse à rester connecté en permanence, pour ne pas risquer de manquer une information ou un événement.
Nous sommes dans une consommation d’urgence, mais passive, qui ouvre la brèche et permet aux plates-formes la recommandation.

Nous voilà, sur les réseaux sociaux, à scroller, de manière régressive, grâce au design de ces plateformes, pour influer sur notre comportement « : Michael Stora

À l’origine il s’agissait de lisser au maximum les interfaces et de les rendre le plus accessibles possible.
Design et viralité participent à la suppression le temps de réflexion, qui induirait un consentement éclairé. La prise de recul est empêchée, et l’usage du libre arbitre détérioré.
À partir de 60 secondes d’attention nous quittons la plate-forme. En réponse , celles-ci proposent des contenus plus en plus courts, par les visuels, la vidéo.

Quels sont les éléments addictifs identifiés ?
Les notifications, sont particulièrement stressantes et nous poussent à cliquer pour découvrir les likes et les messages.
Sur une plateforme ou un site, dès la 10e seconde, nos stimulus sont réactivés avant que notre attention baisse et soit captée ailleurs.
Le système de récompenses aléatoires, est un redoutable mécanisme : une information que nous attendions suivie d’une information décevante, nous maintient en alerte.
Sur un flux numérique, il n’y a pas de signal d’arrêt. Un livre a des chapitres, un magazine également, une série a des épisodes et des saisons, un signal qui indique systématiquement une étape, permettant de s’arrêter. Ce n’est pas le cas sur les réseaux sociaux.

Ces outils fixent la captation de l’attention, phénomène qui a donné lieu à la captologie.
Matthew Crawford -philosophe et universitaire américain, insiste sur le besoin de développer cette capacité de l’attention aujourd’hui « parce que le monde technologique actuel nous aliène en nous retirant des opportunités de la développer avec des hyper-stimuli permanents qui flattent notre moi autonome et remplissent les poches des “architectes du comportement de masse”. 
../…  Avec un conditionnement culturel qui :“… tend à perpétuer l’illusion du contrôle magique de la réalité et l’encourage à percevoir la technologie comme la Maman Suprême prête à répondre sans défaillance à tous ses désirs, et à le protéger des frustrations d’un monde aléatoire.” Une vision de la technologie versus une maman, qui répond à tous nos désirs d’enfants sur-protégés.

« Néanmoins, depuis quelque temps, un certain malaise émerge par rapport à cette captation de l’attention. Les débats se multiplient, et génèrent beaucoup de complexité, mêlant différents registres, éthique, juridique, social. Des analyses en abondance, en découleront des propositions pour remédier à cela.

« Ce modèle économique de l’économie de l’attention n’est pas intrinsèque à la technologie : parmi les nombreux business modèle possibles, mais un seul a été retenu » : Stefana Broadbent. Et toutes les plates-formes fonctionnent sur le même modèle économique.
Ce qui prévaut, comme pour toute firme privée, est la croissance et la rentabilité économique. L’utopie, vertueuse, serait que cette multitude d’ informations publiées sur la plupart de ces plate-forme soit agrégée pour constituer des bibliothèques, des stocks informationnels, un bien commun, un partage collectif.
De générer de l’intelligence collective, émanant de cette communauté de presque 3 milliards d’utilisateurs de Facebook.

Alors. Le numérique est-il au service de l’être humain, ou sommes-nous à son service et celui des plates-formes ?

Le lien vers cette table ronde foisonnante : https://www.youtube.com/watch?v=2TDzlXW91LQ

Quel avenir pour la presse, en 2021 ? Plein d’espoir !

Le numérique a pour le moment plus détruit que créé de la valeur pour la presse. Hégémonie des GAFAs, défiance des lecteurs, appel à la régulation… le secteur subit une révolution digitale – au forceps, accélérée par la pandémie mondiale. Faut-il pour autant abandonner tout espoir d’embellie ?
Certainement pas. La singularité de notre culture et une certaine idée de la presse à la française, ou à l’européenne, pourraient bien ouvrir une nouvelle voie.

Défiance certes, mais record de consommation online

Le baromètre 2020 de confiance dans les médias réalisé par Kantar montre que l’intérêt porté à l’actualité est à son niveau le plus bas depuis 1987.

La crise du Covid-19 accélère inexorablement la fin de la presse papier à travers le monde. Comme le rappelle Cyril Vart, Vice-Président Exécutif de Fabernovel : « Cela ressemble au marché de la presse magazine en 2004. Tout le monde était prévenu qu’il y aurait du changement avec les médias en ligne, mais les médias traditionnels n’ont pas su s’adapter. »

Assez logiquement, les confinements de l’année 2020 ont pulvérisé les records en termes d’abonnements payants pour les médias en ligne. C’est le cas du New York Times, dont les revenus web dépassent désormais ceux du papier : entre les abonnements et les revenus publicitaires, 186 millions de dollars au deuxième trimestre, versus 175 millions pour les ventes et publicités papier. En France, autres records : un nombre d’abonnés supplémentaires pour les journaux Le Monde, Le Figaro, le site Mediapart

Qualité des contenus versus gratuité des GAFAs

Dans ce contexte de digitalisation des médias, l’enjeu reste celui de la rémunération des contenus en ligne viralisés sur les plateformes d’agrégation telles Facebook ou Google. Comment réconcilier la qualité des contenus produit avec la gratuité de leur distribution ?
D’un côté, nous voulons une information vérifiée, qualifiée, produite par un journalisme instruit, ce qui représente un coût. De l’autre côté, le lowcost demande des investissements moindres et sa part de marché ne cesse de croître.

En opposition à cet état de fait, en août 2018, une tribune de journalistes parue dans Le Monde estime que l’Europe doit adopter sa réforme du droit d’auteur afin de protéger la presse de « la prédation des géants du Net ». Elle réclame l’attribution des « droits voisins » à la presse en ligne. Retour en arrière…

Octobre 2019 : Google vient de proposer des accords bilatéraux avec certains médias en Australie, au Brésil, en Allemagne et aux Pays-Bas, pour leur acheter des contenus. Alliance à laquelle résistent les éditeurs de presse français. Le bras de fer commence.
Novembre 2019 : c’est au tour des médias français, Le Monde, Le Figaro, Libération, l’Express, l’Obs ou encore Courrier International, de signer des accords individuels. Voilà une résolution qui équilibre la rétribution de valeur, à la sauce américaine.

« Au lieu de chercher un modèle juste, raisonnable et transparent pour rémunérer les droits voisins, Google essaie d’imposer sa volonté et son modèle aux médias. » lance Daniel Kretinsky, PDG de CMI dans Libération.

Un dossier qui vient de trouver une issue positive, avec la signature d’un accrord entre Google et l’Alliance de la presse d’information générale le 21 janvier 2021. 

Un rapport singulier à la presse selon les continents

Certes, les plateformes de diffusion ont modifié nos systèmes, imposant de nouveaux modèles dans le monde.

En France, l’information est un besoin. C’est même un droit traduit par le principe de la liberté de la presse. La presse et les médias ont ce rôle majeur d’équilibre et d’accès à la démocratie. Nous nous battons énergiquement pour cette démocratie, cette liberté.

Curieusement, les Français caracolent en tête de ceux qui lisent le moins la presse quotidienne papier : 8% y sont fidèles contre une moyenne mondiale de 14% !
Rétribuer un média pour garantir une information fiable n’est pas, non plus, l’apanage de notre société : seulement 15% d’entre nous se dit prêt à payer, selon une étude Ipsos menée dans 29 pays. (Ipsos, octobre 2020)

A l’égard du marché asiatique, nous nourrissons une fascination certaine, alimentée par leur phénoménale avance technologique. L’accès à l’information diffère. Chaque citoyen chinois est équipé d’un smartphone : 92,5 % de la population accède à Internet grâce aux applications sélectionnées. Les réseaux sociaux étrangers dont Facebook et Twitter sont bloqués, des millions d’employés contrôlent et censurent ce qui se dit sur Internet.

Autre modèle, de l’autre côté de l’Atlantique, aux USA. Ici, la constitution ne garantit pas le droit général au respect de la vie privée. Les réseaux sociaux sont hégémoniques, portés par le soutien des hubs : universités, gouvernement, entreprises et investisseurs. Ces plateformes ont répondu à nos besoins de communautés, et permis de nourrir nos appétits d’information, gratuitement -en apparence. Elles participent à la diffusion de l’information, créée par les médias, avec la puissance de viralité qui leur appartient.

« Il en résulte une forte dépendance à Google et Facebook. Pour certains médias, cela va jusqu’à 30% ou 40% de leur chiffre d’affaires » constate Sylvain Levy-Valensi fondateur de Webradios Edition.

Un retard de régulation ?

Il est bien trop tard pour nous opposer ou même les concurrencer. Néanmoins, les courbes des cycles sont à l’œuvre. Depuis peu, les rebellions se font jour sur le territoire natif des géants numériques, aux USA. Selon G H. Smith, Président du syndicat des intérêts des radios et des télés, « Ces géants font du tort aux 7 500 chaînes de télévision et radios locales, en siphonnant à hauteur de 70% depuis 20 ans, leurs revenus publicitaires. »
Une revendication attestée : Google et Facebook contrôlent à eux deux 77% des revenus publicitaires sur le plan local.

Sur ce point, il est positif de constater que les différents mouvements politiques s’accordent sur une régulation des revenus de ces monopoles.

A l’origine, était l’atout gagnant : la prééminence du soutien étatique, a permis de mener à l’apogée ces puissances technologiques.

Eric Scherer, Directeur de l’Innovation et des Affaires Internationales de France Télévisions insiste sur cette déficience : « Le manque de soutien politique en Europe pour le développement de structures est patent. Nous sommes en retard, notamment pour collaborer. Il n’y a pas de sphère publique numérique européenne. » L’Etat doit jouer son rôle.

Capter l’attention, ou faire d’autres choix

On pense que Facebook vend nos données. Plus subtilement, Facebook les exploite. Ce réseau social élabore des modèles pour prédire nos actions, et les orienter. Notre psychologie inspire la tech ! C’est l’utilisation de ce que l’on sait de nos comportements cognitifs, qui élabore des technologies.

Ferons-nous ce choix ? Entrerons-nous dans cette compétition de l’attention, cette exploitation de nos données, en échange de nos usages ?

Ou serons-nous capables d’élaborer un autre modèle ?

L’une de nos forces s’opère à travers les régulations, les législations en faveur de nos principes éthiques. Subséquemment, le contrôle pour préserver le droit à la vie privée.  « Renforcer nos barrières pour préserver nos valeurs ancrées sur l’humain, notre culture », ainsi que le préconise Sylvain Levy-Valensi.

Cela rejoint notre souhait de souveraineté. « Certes, la frontière est ténue avec le protectionnisme, ajoute Mick Lévy, Directeur de l’Innovation chez Business et Décision. Ce sujet ne concerne pas les USA, car ils ont à la fois un gigantesque marché intérieur dynamique, ils ont toutes les meilleures technologies et les données restent sur leur sol. Ni la Chine, avec de surcroît la protection du « great firewall » qui instaure un Internet verrouillé à l’échelle du pays. »

Quelques pistes à expérimenter

Nous devons nous définir. Identifier nos singularités, les activer, les défendre.

A l’échelle individuelle, par nos usages : l’internaute zappe d’un réseau social à l’autre, rebondit entre les podcasts, les vidéos, les newsletters… C’est la génération snacking. Devant la pléthore d’informations, nous pouvons investiguer une piste proposée par Nesem Ertan, ‘‘le nutritionnisme de contenu’’. Ainsi que nous nourrissons notre corps par des aliments choisis, frais, bios… nous pouvons travailler à éduquer notre consommation digitale.

Pourquoi pas en adoptant les principes numériques de la plateforme ? La presse c’est un nom, un média, tel un lieu où l’on se rend, que l’on consulte. Il faut désormais, envisager le modèle de plateforme. Le media n’a plus une voix unique, il est enrichi par de multiples sources, des interactions, une riche capillarité. La co-construction s’initie alors, vecteur d’ouverture et de développement.

Pour l’illustrer, une consultation citoyenne a été réalisée lors du premier confinement : un dialogue journalistes/citoyens qui a identifié un besoin de coopération pour l’éditorialisation de la presse locale. Cela a débouché sur des collaborations concrètes, entre journalistes et citoyens locaux. De ces échanges fructueux sont nées des publications, des réalisations…Cela permet une proposition d’expérience, impliquante, bien au-delà de l’internaute simplement lecteur.

Pourquoi pas, aussi, utiliser la technologie comme outil de création. Avec la démocratisation de l’intelligence artificielle, les modes conventionnels sont bousculés. Ainsi, cet article entièrement rédigé par une IA, qui arrive en première place sur Hacker News.Et si nous utilisions ces technologies au service de notre créativité ? Pour inventer des produits et des modèles qui nous sont propres, qui nous ressemblent culturellement. Et s’élever vers d’autres perspectives.

Cette troisième voie, protéiforme, est à construire.
A cet égard, le projet de GaiaX lancé en Juin 2020 est prometteur : 180 entreprises et institutions européennes se sont alliées et initient le socle de notre souveraineté numérique. Une déclinaison d’une partie des services est à l’œuvre pour les secteurs comme la presse. Si cela fonctionne, ce serait la meilleure possibilité de défendre des valeurs européennes de protection de la vie privée et de diversité.
La possibilité, enfin, d’une Europe numérique indépendante, sa déclinaison de services en adhésion avec nos valeurs.

Après l’hégémonie commerciale inquiétante des géants du Net, leur abus de pouvoir patent, c’est de l’équilibre politique mondial dont il s’agit, comme nous l’avons vu avec les récents événements de Washington.

Il nous incombe de préserver cette liberté, à travers l’information aussi.

Article publié sur METAMEDIA, Janvier 2021
https://www.meta-media.fr/2021/01/22/quel-avenir-pour-la-presse-en-2021-plein-despoir.html

La crise actuelle est un catalyseur de l’acculturation numérique

Interview : pour la Newsletter Orange

La soudaineté de la crise du Covid-19 et le confinement généralisé ont propulsé les usages numériques à un niveau jamais atteint. Télétravail, communications privées, apéros en visio… durant deux mois tout (ou presque) est passé par le canal digital. Quels enseignements peut-on tirer de cette période exceptionnelle ?

Réponses avec Fabienne Billat, conseillère en communication et stratégie digitale.

Quels phénomènes liés au numérique vous ont particulièrement étonnés durant le confinement ?

Fabienne Billat – Au-delà des usages massifs des applications de vidéoconférence et du « live » permis par le web, j’ai été surprise par la transformation et l’approfondissement des relations pour les personnes contraintes d’utiliser ces outils inhabituels de communication, dans le cadre de leur travail notamment. Le fait de ne pas être physiquement présent modifie le charisme des interlocuteurs, leur sémantique et oblige à développer des compétences relationnelles très spécifiques. C’est un nouveau savoir-faire que nous avons expérimenté mais qui reste à acquérir complètement.

En France, de nombreuses critiques ont visé la digitalisation du traçage de l’épidémie alors qu’elle est déployée ailleurs dans le monde. Comment les autres pays ont-ils conduit cette approche ?

F. B. – Tout d’abord, les applis de tracking sont utilisées à différents degrés de surveillance : de la simple cartographie de la propagation de l’épidémie sur le territoire, comme en Allemagne, jusqu’à l’approche sécuritaire, à l’image de Taïwan, où l’appli permet d’alerter les autorités. En Allemagne, le système s’appuie sur le volontariat dans le respect des libertés personnelles. À l’extrême inverse, en Chine, le traçage permet de nourrir le « crédit social » cette appli digitale liberticide qui « note » les citoyens.

Comment expliquer l’attitude de défiance des Français ?

F. B. – C’est dans le caractère des Français de se placer dans une position contestataire… Et il est évident qu’il est nécessaire de s’interroger sur le respect des libertés dans le cadre de nos valeurs démocratiques. Mais, d’un autre côté, il est également impératif de pouvoir expérimenter une technologie pour pouvoir l’évaluer avant de l’adopter ou l’abandonner. Sans quoi, on ne peut pas progresser : la technologie du digital se nourrissant des données, l’usage est en effet essentiel dans un esprit « test and learn ». La maturité des Français par rapport aux usages du digital souffre d’un certain retard.

La période de confinement a mis en lumière le rôle essentiel du numérique pour assurer la continuité des activités des entreprises, de l’éducation…. Quel regard portez-vous sur les forces et faiblesses du numérique ?

F. B. – Le numérique est un « pharmakon », c’est-à-dire une arme à double tranchant ou un médicament avec potentiellement d’importants effets indésirables. Dans le cadre du télétravail, par exemple, le confinement a permis d’expérimenter une autre façon de travailler et de s’interroger, aussi, sur la possibilité de mettre en place de nouvelles formes d’organisation du travail. Les mentalités ont évolué en très peu de temps, ce qui est très positif pour l’acculturation des individus au numérique. D’un autre côté, ce télétravail interroge sur la frontière entre vie professionnelle et vie personnelle, de plus en plus difficile à maintenir lorsqu’on travaille en entreprise. J’ai la conviction que des formations et des accompagnements doivent être mis en place pour gérer ce mode complémentaire de travail.

Pour le numérique, en général, l’aspect négatif tient à la généralisation des usages : plus il y a de volume, plus les risques de conséquences négatives augmentent. Mais cette équation n’est pas spécifique au digital.

Acculturation, maturité numérique des entreprises… Quels sont les pays les plus en avance et pour quelles raisons ?

F. B. – Les raisons sont nombreuses et liées à l’histoire et à la culture voire à la géographie humaine de certains pays. Des pays avec des marchés intérieurs limités, comme la Suède ou Israël, se tournent obligatoirement vers l’international et usent du numérique comme d’un levier. Or, avec l’internationalisation et le numérique, l’anglais est la condition sine qua none du succès. L’Estonie est un cas particulier : sa forte digitalisation est la résultante de son histoire politique qui l’a engagée à revoir l’ensemble de son système administratif au moment de la chute de l’URSS. Les pays anglo-saxons et du nord de l’Europe sont également en avance sur la digitalisation. D’un point de vue culturel, ces pays sont très sensibles et attentifs aux notions de service et d’expérience client. Or, les clients sont friands des usages numériques via le smartphone notamment. En France, les entreprises sont encore très orientées « produit ». Tout l’enjeu de la transformation numérique tient dans ce changement de paradigme. La crise actuelle peut éventuellement accélérer la prise de conscience mais on ne peut pas changer un modèle instantanément : il faut une culture de la connectivité en interne partagée par tous les collaborateurs et notamment les managers. Le leader ou le management connecté est le moteur de la transformation des entreprises.

En France, l’immaturité digitale concerne-t-elle tous les types d’entreprises ?

L’immaturité numérique touche essentiellement les TPE et PME. En France, on estime en effet que 81 % des entreprises de taille intermédiaire ont engagé leur transformation digitale. Or, même les petites structures doivent réfléchir à leur digitalisation, tout simplement parce qu’elles sont déjà présentes sur le web, parfois malgré elles, via leurs clients qui se renseignent sur internet et commentent leurs expériences via les réseaux sociaux.

La transformation digitale n’est donc pas simplement une question de technologie…

F. B. – Absolument. Il s’agit de conduire une stratégie d’avenir, une nouvelle orientation qui résonne avec la culture et l’histoire de l’entreprise et qui embarque les collaborateurs. La transformation ne consiste pas à acquérir une technologie dite innovante, mais de trouver la technologie qui réponde aux besoins de l’entreprise et aux attentes des collaborateurs. L’humain est central.

À l’heure actuelle, quels sont les enseignements que l’on peut tirer de cette crise ?

F. B. – Une crise n’est que le révélateur d’une situation : elle met en lumière ce qui ne fonctionne pas et ce qui doit être (ré)ajusté, tandis que les expériences positives doivent être prolongées. Mieux que des injonctions répétées, ce rappel exogène, certes soudain et violent, incite à passer un nouveau cap. Il y a une nécessité pour tous d’acquérir une citoyenneté numérique qui ne pourra s’exprimer que si chacun acquiert des connaissances et des compétences numériques qui lui permettront d’exprimer un avis. Cela ne passe pas seulement pas la formation ou l’école mais, aussi, par la curiosité individuelle, l’envie d’expérimenter pour aller de l’avant et progresser.

Publié en mai 2020

Membre du Comité Stratégique Digital de la Caisse des Dépôts CDC2, Fabienne Billat fait du conseil en communication et stratégie digitale. Elle intervient dans les grands groupes et certaines institutions pour stimuler la transformation numérique en interne et accompagne les dirigeants dans leur présence digitale.
Fabienne Billat @fadouce s’adresse quotidiennement à plus de 40 000 abonnés sur Twitter.

L’ère numérique: des égarements, puis quelques perspectives systémiques

Gal (2)

Pour 2020, « l’année de la curiosité », les experts de l’Institut Sapiens se sont lancés dans des prospectives initiant des chemins de réflexion, que vous retrouverez, là:  https://www.institutsapiens.fr/2020-annee-de-la-curiosite/

Mon billet est ici dans sa totalité, appréhende le vaste champ -et hors champ, d’exploration de l’ère numérique ! Qu’en pensez -vous ?
Merci de votre attention !

La décennie passée nous autorise à poser un regard sur l’acmé de la «transformation numérique», de projeter une approche conceptuelle des étapes qui se sont déroulées sur le terrain économique, politique, social, pour en dessiner les nouvelles perspectives.

Le numérique impacte l’économie, en une sorte de rupture incrémentale, et l’analyse explique les tâtonnements, voire les résistances françaises.
La première phase pourrait être celle d’un malentendu -cette injonction de « transformation numérique » corrélée aux outils informatiques, ensuite orientée par le marketing. Une conception, oscillant entre technologie et exécution organisationnelle, médiatisée à l’excès, qui n’a suscité que perplexité, voire appréhension auprès des dirigeants.
La brèche était ouverte !

Confondant les moyens et les objectifs, notre société technophile offre le plus souvent des outils en réponse aux attentes d’organisation. Une justification qui prend de l’ampleur avec les technologies actuelles.

La deuxième phase invoquant le tout transversal, a suggéré aux entreprises de désiloter pour améliorer la collaboration. Mission quasi impossible ! Car les objectifs des enjeux métiers sont difficilement conciliables, notamment dans les grands groupes édifiés historiquement. Pour toute structure, chacun des silos a, au-delà de sa fonction initiale, ses intérêts propres : des objectifs, des timings divergents, des modes de rémunération multiples. Le pouvoir de chaque service, réside encore dans la préservation de ses intérêts.

Comment intégrer ces résistances et retrouver la valeur cardinale des organisations ?
Le fondamental, est l’humain. L’entreprise est une communauté d’individus. La réunion de ces individus, une multitude d’intelligences rassemblées, qui font société, un concept que nous devons réhabiliter.

Dès lors, la «transformation numérique» n’est plus la terminologie adéquate, nous avons là une mission d’évolution globale des organisations, du manager aux équipes .
Mais «la pensée occidentale, a développé une pensée fractionnée, qui ne convient pas à l’efficacité pour les systèmes» analyse Chantal Gensse dans « L’entreprise insoumise ».
Cette étape de co-construction, par l’intelligence collective, n’est pas totalement acquise dans la culture de l’entreprise française.

Et cela prendra du temps, car, pour que l’individu évolue, on doit lui proposer de pouvoir mesurer son intérêt personnel. Pas l’intérêt de l’entreprise, non, le sien ! Avec la conscience de la difficulté représentée pour la gouvernance, d’embarquer individuellement puis collectivement. En définitive, cette recommandation de décloisonnement, de partage, se trouve être la plus concordante avec la proposition numérique et ses modes collaboratifs.

La nouvelle génération en a les clés. Pour autant, nous n’avons pas éduqués nos enfants avec les outils qu’ils utilisent aujourd’hui, nous ne les avons pas connectés sur Blablacar, ni sur les plateformes de couchsurfing. Nous ne les avons pas interpellés sur l’écologie dans leurs usages numériques, ni même avertis sur le binge watching avec les séries sur Netflix, ou sur la culture du partage. Certains sont des amateurs éclairés. Ils maîtrisent, vivent les notions de partage et de coopération dans leurs vies quotidiennes.

En parallèle de l’usage qu’ils attendent en tant que consommateurs, ils risquent de remanier fortement en tant que citoyens, les processus de l’emploi, et tout le modèle du monde du travail. De pousser les entreprises à revoir leur méthode de recrutement et encore plus en avant, leur discernement des profils, et des parcours professionnels.

Le numérique est aussi politique : Ses effets, des conséquences qui nécessitent la prise de conscience.
13 millions de français sont considérés en situation d’illectronisme.
A la fracture numérique, sorte de ligne de rupture symbolique, correspond la fracture sociale. Le gouvernement se trouve dans l’intimation d’une simplification par la dématérialisation des démarches administratives. Et parallèlement, dans une obligation d’accompagnement, d’apprentissage, pour l’inclusion. Ainsi, la mise en place de structures telles les maisons de service. Ce n’est pas seulement un manque de technicité qu’il faut combler, mais la compréhension du monde digital par chaque citoyen, dans l’objectif du tout numérique.

Autre impératif : la nécessité de réguler, au niveau législatif, pour l’usage de ces technologies -la reconnaissance faciale, l’intelligence artificielle – et ses biais. L’abondance technologique invite à la définition de cadres.
Pour pallier cette fracture, à la fois sociale, territoriale et géographique, c’est par un angle élargi, jusqu’au système éducatif, à la formation de toutes les parties prenantes, que la société apportera les solutions.

Après avoir parcouru quelques-uns des stades de cette dynamique, quelles réponses ?

Le témoignage de Guillaume Pepy, ex Président de la SNCF, confirme que « c’est dans l’organisation que se trouve la clé de la transformation ». L’étape cruciale pour l’évolution de l’entreprise est celle qui englobera tous les systèmes : la révision des process, par l’implication managériale et l’engagement des collaborateurs. Ce parti-pris est confirmé par l’expérience de Pascal Demurger, PDG de la MAIF.« On n’accepte plus de travailler uniquement pour un salaire : insuffler du sens par des projets, restaurer la confiance en responsabilisant, et privilégier le collectif sur la compétition individuelle. »

Ma conviction est que cette problématique de l’évolution des organisations à travers le numérique, doit être appréhendée de manière encore plus vaste : par une conception systémique. C’est une proposition qui nécessite une réponse concordante. Alors que nous oeuvrons segment par segment, à coup d’initiatives isolées. A l’avenir, nous devrons travailler par des approches, des stratégies de bataille transverses, pour faire grandir nos entreprises, nos organisations.

Afin de les inscrire dans la cohérence pour les communautés, les individus. L’analyse systémique apporte un cadre, modélise tous les points d’entrée liés au numérique, avec les variables que cela comporte.
C’est par cet angle systémique, que nous devons penser, agir. Assurant un socle solide, évolutif, pour la pérennité, économique et sociale.

 

La Transformation Numérique de l’Entreprise – And more : l’employee advocacy !

Ce sujet est encore méconnu et encore moins déployé dans les entreprises. Aujourd’hui il abonde en éléments chiffrés, car les études permettent de mesurer les effets (positifs !) de l’impact de l’engagement des collaborateurs.
Je reprends en partie cette interview proposée par Be Smarp, en 2018..

Valène Jouany : Bonjour Fabienne, vous avez fondé #FemmesduNum à Lyon, pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

Avec 10 ans d’expérience en agence et après avoir fait mes armes dans une startup en 2009, je conseille les dirigeants des grands comptes et des ETI dans le cadre de leur transformation numérique.

J’accompagne les dirigeants et les équipes de managers dans leur stratégie de communication digitale. Les grands comptes me sollicitent pour réaliser des conférences, je leur propose des interventions ciblées pour les diriger dans leur investissement dédié à la culture digitale et pour les aider à performer économiquement dans l’ère numérique.

D’après vous, pour quelles raisons le numérique est devenu une évidence pour l’entreprise d’aujourd’hui ?

Le numérique est devenu une évidence tout simplement parce que les consommateurs sont connectés sur le web. On estime par exemple que chaque consommateur gérera 85% de sa relation avec une marque directement sur le web sans interagir avec un être humain d’ici 2020.

Dans un contexte concurrentiel, une marque qui n’est pas présente sur le web est finalement comme une marque qui n’existe pas car les consommateurs Français sont de plus en plus connectés : aujourd’hui, ce sont 26,5 millions de Français qui se connectent à au moins un réseau social. De plus, 7 consommateurs Français sur 10 effectuent des achats en ligne.

En parallèle, la communication corporate est remplacée par les recommandations en ligne :  les consommateurs Français sont en effet de plus en plus attentifs aux avis postés sur le web par d’autres consommateurs. Ils ne se content plus de visiter le site web officiel de la marque pour se renseigner sur ses produits ou sur ses services : 84% d’entre eux lisent des articles partagés par leurs proches pour s’informer et 49% d’entre eux regardent des vidéos partagées en ligne par leurs amis. Il faut savoir que 80% des informations relatives à une marque sont partagées en dehors de sa communication corporate.

Cependant, nous remarquons que 88% des entreprises ne sont pas présentes sur LinkedIn, 73% d’entre elles n’ont pas de page Facebook et 93% d’entre elles n’ont pas de blog ! Seulement 1 grande entreprise sur 2 et 1 PME sur 8 utilisent des solutions de vente en ligne. Or, le web a un formidable potentiel (et est une réalité !) pour les entreprises : nous comptons aujourd’hui 30 millions de consommateurs en ligne et nous estimons que les PME françaises pourraient gagner jusqu’à 1,5 million de consommateurs en comblant leur retard.

De nombreuses entreprises françaises fonctionnent par silos, en quoi le numérique permet d’améliorer leur communication interne ?

L’utilisation de la data amorce de nouvelles perspectives. Et pourtant, seulement 10% de la donnée est traitée par les entreprises. Elle apporte un volume d’informations exponentiel sur les consommateurs connectés. Dès lors, quel process ? Captées par les services informatiques, elles seront ensuite traitées, et c’est là où le décloisonnement entre les métiers devrait avoir lieu : marketing, communication, commercial, jusqu’aux RH, auront inéluctablement à utiliser ces données dans un objectif de connaissance client et de performance commerciale.

D’une manière plus générale, la transformation numérique n’est pas réservée à un ou à des secteur(s) en particulier. Les startups créées par les digital natives ont la dimension digitale et les usages intégrés ! Ce n’est plus un sujet. Citons l’emblématique Michel et Augustin comme exemple d’entreprise agile, réactive, en osmose avec sa communauté de consommateurs. La technologie rassure, mais ne garantit pas l’implication, ni la transformation numérique ! La culture est primordiale.

Une entreprise est le résultat d’un contrat passé entre quatre intervenants :
les employés, les clients, les actionnaires et les gestionnaires.
L’utilisation des réseaux sociaux, de plateformes et de réseaux internes permet à l’ensemble de ces intervenants de se rapprocher et d’échanger des informations en continu.
Notre système pyramidal nécessite des validations, des allers retours qui consomment du temps et nuisent à la réactivité. Or, la communication via des réseaux et des plateformes gomme ces strates et procure un gain de temps considérable.  Prenons un exemple : Google a 5 niveaux hiérarchiques alors que pour le même type d’entreprise, nous en avons 12 en France !

Les modèles collaboratifs sont encore très peu utilisés en France :  seulement 29 % des entreprises Françaises ont testé ces nouveaux modèles. Les RSE (réseaux sociaux d’entreprise) sont utilisés par 40% d’entre elles.

Les PME Françaises sont également en retard dans leur transformation numérique par rapport aux autres PME Européennes. Ce retard est particulièrement visible en termes d’adoption de solutions digitales, comme la présence de l’entreprise sur Internet et sur les réseaux sociaux, la réalisation de ventes en ligne ou l’utilisation d’outils digitaux visant à améliorer leur productivité.

 Les salariés jouent un rôle central dans ce processus, pouvez-vous nous en dire plus ?

Le web est une plateforme apprenante qui donne accès aux salariés à des informations actualisées tous les jours. Le web leur permet de découvrir de nouvelles solutions et d’améliorer leur veille technologique.

Le partage de connaissances devient indispensable pour réaliser les missions plus efficacement mais le ROI par rapport à ce type d’initiative étant encore difficile à mesurer, les managers n’encouragent pas les salariés à exploiter tout le potentiel offert par le web. En effet, 77,3% des employés ne se sentent pas encouragés par leur employeur à partager des informations le concernant sur les réseaux sociaux.

D’après la Harvard Business School, les contenus de marque sont partagés 24 fois plus souvent et leur portée est 561% supérieure lorsqu’ils sont relayés par les employés plutôt que diffusés par la marque.

En parallèle, Nielsen a montré qu’en Europe, 78% des consommateurs font confiance aux recommandations de leurs pairs alors que seulement 32% d’entre eux font confiance aux publicités diffusées par les marques sur les médias sociaux, d’où l’intérêt d’encourager les salariés à devenir des ambassadeurs sur le web !

La formation aux outils du numérique est capitale dans un processus de transformation numérique, avez-vous des conseils pour sensibiliser les salariés et pour les former de manière efficace ?

En France, nous avons tendance à être actifs sur les réseaux sociaux dans un cadre personnel mais nous sommes en retard concernant l’utilisation des réseaux sociaux dans un cadre professionnel.

Je pense que les entreprises doivent former l’ensemble des salariés à l’utilisation du web, celle-ci devant être ancrée dans leurs habitudes de travail.

En se rendant plus visibles sur le web, les salariés développent leur employabilité et leurs compétences et les informations récoltées vont être également bénéfiques à l’entreprise.

Or, très peu d’entreprises françaises forment les salariés à l’utilisation des réseaux sociaux sur le long terme d’où un découragement de la part des salariés car ils ont peur de faire des erreurs. Il n’y a pas un seul cursus de formation qui va convenir à toutes les entreprises et il n’y a pas non plus un modèle unique de transformation digitale.

Bien évidemment, il s’agit là de former les employés avec différents moyens, selon les attentes des managers et des salariés.. Il faut proposer aux salariés une palette de formations pour répondre à leurs différents besoins.

De plus, la création d’une charte d’utilisation des réseaux sociaux va permettre à l’entreprise de rassurer les salariés par rapport aux informations qu’ils peuvent communiquer.

Un autre point important : il faut que le management montre l’exemple.

79% des Français attendent du dirigeant qu’il montre son engagement à faire progresser la société en prenant part aux conversations sur le web.

Stéphane Pallez, CEO de La Française des Jeux, Laurence Paganini, CEO de Kaporal Group, Nicolas Sekkaki, CEO d’IBM France ou encore Nicolas Bordas, Vice-Président International de TBWA\Worldwide sont des dirigeant(e)s très actifs/ves sur les réseaux sociaux, ils montrent l’exemple aux salariés sur la manière de s’exprimer et sur les contenus à partager dans un contexte professionnel.

Quels sont d’après vous les avantages à la fois pour l’entreprise et pour les salariés d’encourager ces derniers à développer leur marque personnelle sur les médias sociaux via l’employee advocacy ?

L’employee advocacy est bénéfique aussi bien à l’entreprise qu’aux salariés, il s’agit en effet d’une collaboration « gagnante-gagnante »

Les avantages de cette stratégie incluent notamment l’augmentation de sa visibilité sur le web, le développement de sa marque employeur, la hausse du trafic web :

  • Plus de 79% des entreprises interrogées par Hinge Research Institute déclarent que l’employee advocacy leur a permis d’augmenter leur visibilité auprès de leur public cible ;
  • 44,9% des entreprises augmentent leur trafic web via l’employee advocacy (Hinge Research Insitute).
  • 2% des salariés partageant des informations relatives à l’entreprise sur les réseaux sociaux génèrent 20% de taux d’engagement vis-à-vis de la marque (Le Blog du Communicant) ;

De plus, les collaborateurs inspirent confiance mais pour le moment, seulement 33% des employeurs les encouragent à partager des contenus de l’entreprise (KRC Research).

En parallèle, l’employee advocacy aide les salariés à construire leur marque personnelle. En communiquant sur la marque, ils montrent à leurs abonnés leur engagement au sein de l’entreprise et leur passion pour leur travail. Ils construisent ainsi leur personal branding et assurent leur employabilité.

Par leurs prises de parole sur les réseaux sociaux, les salariés ont un impact sur les performances de l’entreprise : ils peuvent en effet attirer de nouveaux prospects, trouver de nouveaux fournisseurs, être à l’origine d’une innovation, identifier des experts et de manière plus générale, ils augmentent la visibilité de la marque sur le web.

Il peut être facile de se sentir comme « un employé parmi tant d’autres », surtout dans de grandes structures. Or, l’employee advocacy permet aux salariés d’être reconnus par leurs collègues. En parallèle, cette stratégie renforce le sentiment d’appartenance et l’engagement des salariés au sein de l’entreprise.

Enfin, les salariés développent leur soft skills dont la curiosité, l’empathie, le sens du collectif, la capacité à formuler une idée ou à effectuer une veille technologique.

Avant de nous quitter, si vous deviez résumer en quelques mots la manière dont les entreprises devraient envisager l’ère numérique, que diriez-vous ?

L’ère numérique s’envisage comme une exploration, sans carte d’orientation établie à l’avance. Toute entité définira son usage puis ses destinations en fonction de sa culture, de sa gouvernance et de ses ressources humaines. À cet égard, l’enrichissement est inéluctable !