Du buzz à l’influence, une simple histoire de manipulation ?
Votre objectif : 20 000 followers. Des gains de 5000 € par mois.
Si vous êtes présents sur les réseaux sociaux, vous êtes peut-être amusé de cette promesse, proposée par la société Ambaza, la première école d’influenceurs française. Au-delà du buzz, plutôt bad, de l’annonce de l’ ouverture de cette formation de 28h pour 1 200 euros, reconnaissons l’ampleur de la tendance et de l’intérêt pour l’influence dans toute son envergure.

Récemment, Bloomberg a partagé un sondage. Il en ressort qu’un européen sur dix est prêt à quitter son emploi actuel dans les six prochains mois, pour tenter de faire carrière de influenceurs sur TikTok.
Pour reprendre les mots de Cyril Attias, fondateur de l’une des toutes premières agences de social média, en 2020 : « l’influence digitale n’est pas un sujet à la mode, c’est une vraie transformation sociétale, de consommation et d’usages intergénérationnels. » Et dans cette amplification, le rôle de la viralité technologique. C’est un rôle essentiel ! Les plates-formes en ont permis l’avènement. Considérer qu’avec une seule publication sur une publication sur une plate-forme digital, les prescripteurs peuvent partager une information information, un avis politique, recommander un produit ou un service, auprès de milliers voire des millions de personnes selon la viralité. Et ce, en quelques secondes. Nous sommes presque tous impliqués.
62 % des consommateurs réagissent au moins une fois par jour aux publications d’un leader d’opinion.
Derrière ces activités fructueuses, se cache un vice, un concept moins vertueux, celui de la manipulation : comment situer la frontière entre l’influence et la manipulation?
Nous y sommes ! Et c’est Robert B. Cialdini, psychologue social américain, qui détaille ces frontières : il explique pourquoi certaines personnes sont douées d’un remarquable talents de persuasion, et comment il est possible de les battre sur leur propre terrain. Il délivre donc sept armes de persuasion dans un large panorama de technique et théorique en tout genre, pour obtenir quelque chose de nouveau, sans que nous nous y opposions. Ces moyens peuvent se mettre en place grâce a notre dangereuse tendance à nous laisser influencer. Car nos comportements humains se répètent, automatiquement et fréquemment, et le virtuel valide ce postulat.
Comment, dans cette infobésité pouvons-nous distinguer les contenus à visée manipulatoires ?

Le recours à l’influence n’est que la partie émergée est visible de tout un champ de propositions. Or, à la capacité d’influence, répond la compétence d’écoute, d’audit des flux et des conversations des communautés. On propose ici le triptyque de l’intelligence économique.
Veille, production et influence. Car selon Carlo Revely, chercheur en sciences de l’information à l’université Paris X et auteur de plusieurs articles sur le sujet, « tout organisme doit apprendre à maîtriser les flux informationnels avant de prendre une quelconque décision stratégique ».
Grâce au partage, aux commentaires et aux like sur les plates-formes, l’écoute des réseaux sociaux permet d’identifier les signaux faibles. La détection, de ses signaux est le point fort des résultats de la veille. Cette notion de signal faible remonte aux années 70. Mis en perspective dans un contexte précis, ils peuvent s’avérer extrêmement instructifs et apporter un décryptage et des analyses positives pour nourrir les stratégies économiques des entreprises et les soutenir dans leur performance.
Cela apporte la vision de « comment s’organise le monde autour de nous, la société connectée ? » Et c’est un monde qui évolue très vite.

Cette écoute, cette inférence sociale, est maîtrisée par quelques agences, avec des outils technologiques élaborés sur-mesure, qui permettent de découvrir 10 à 100 fois plus de contenus et de personnes pertinentes, qu’une recherche par mot-clé. Or la puissance de la boucle, peut être un formidable moyen de glisser vers la manipulation, et la désinformation voire, la surveillance. Cette écoute active est donc le terrain de l’influence mais aussi des risques et beaucoup plus forts, est porté par des entreprises puissantes ? – Oui, et d’autres business très profitables , se font jour.
Mediapart a dénoncé récemment l’une des plus grandes entreprises de manipulation de l’information intervenue en France, et révèle tout un écosystème qui partage les démarches pour promouvoir les intérêts de leurs clients mais aussi dézinguer la concurrence. Leur méthode : tromper le public en publiant des articles semblant rédigés par des journalistes indépendants, sur des sites et des plateformes ressemblant plus ou moins à ceux de journaux ou médias. Dans le cadre de mes activités de communication d’influence, j’ai moi-même été approchée. A l’issue de l’entretien, je reconnais ne pas avoir du tout identifié l’usage dévoyé et répréhensible de leur offre de collaboration. J’avais, comme à l’accoutumée, carte blanche pour rédiger les articles sur mes sujets de prédilection et la possibilité de signer les billets auxquels j’adhère. J’ai toutefois refusé leur proposition , car ce procédé bien que confortable ne répondait ni à mon éthique, ni à mes besoins d’investigation n conclusion, le zoom est souvent fait sur l’influence, mais cet angle sape les étapes précédentes.
Le déroulé de l’équation gagnante serait, pour toute entreprise, la courbe vertueuse : Veille et écoute, inférence sociale, analyse, production, et en cerise sur le gâteau, l’influence !
Chronique issue du podcast Trench Tech, avec Laurence Devillers :
« IA et robots, il faut voir comme ils nous parlent ! » https://podcast.ausha.co/trench-tech/laurence-devillers-ia-robots-il-faut-voir-comme-ils-nous-parlent