La Chine s’est réveillée, et démontre une vigueur économique prodigieuse.
L’État chinois encourage l’entrepreneuriat et les start-up depuis 2015, identifiées comme leviers de la croissance économique, en facilitant l’accès aux financements.
La principale ambition de la stratégie de Xi Jiping, Secrétaire général du Parti communiste, est d’ouvrir) une nouvelle route de la Soie et de multiplier les partenariats économiques.
Le périmètre du delta de la Rivière des Perles s’étend de Macao à Hong Kong, en passant par Guangzhou -Canton et Shenzhen. C’est la plus grande région urbanisée du monde dont la vocation est de devenir le hub technologique le plus puissant du monde.
Dans les écosystèmes économiquement forts, la conjonction, dans un espace géographique donné, de la présence d’universités et d’investisseurs, d’incubateurs/accélérateurs et d’une volonté politique forte crée une conjoncture économique propice pour les entrepreneurs.
Hong Kong moteur économique, engagé au grand galop
« A Hong Kong, il y a one country, two systems, car le système juridique reste britannique. Et pas de corruption. Ce qui sécurise toute création d’entreprise » affirme Delphine Colson, de la French Chamber à Hong Kong.
Ce sont les USA qui créent le plus d’entreprises à Hong Kong : 20,7% d’entre elles sont américaines. Les entreprises françaises arrivent en quatrième position, et représentent 10,3 % des entreprises.
Depuis 2013, émergent avec force de nouveaux secteurs d’activité : les industries créatives, l’IoT (l’internet des objets) et la fintech.
La création d’une entreprise est particulièrement favorisée à Hong Kong par un environnement fiscal avantageux. Il n’existe pas de TVA, il y a seulement trois impôts directs : sur les bénéfices, sur les revenus, à 15% versus 75% en France, et sur les revenus immobiliers. L’imposition est plafonnée à 16,5% sur les profits et il n’y a pas de taxe professionnelle.
Le point faible de Hong Kong ? Le coût du logement ! Mais qui impacte peu sur le coût de la vie, un salaire moyen à Hong Kong est aujourd’hui équivalent à celui des parisiens.
Depuis 2015, les start-up de Hong-Kong ont bénéficié de financements importants. Cette année là, les fonds de capital-risque, soutenus par le gouvernement, ont levé 230 milliards de dollars, selon l’agence Bloomberg. Par voie de conséquence, les créations de start-up ont été multipliées. En août 2015 il y avait 1 558 start-up à Hong Kong, soit 46 % de plus qu’en 2014. (Source InvestHK, Office de développement économique hongkongais)
Et même si les incubateurs se sont développés tardivement, -en 2010 on ne comptait que 3 incubateurs et espaces de co-working- leur nombre a explosé depuis !
Face à un pays réputé pour ses copycats, Hong Kong a maintenant soif d’innovation. Notamment pour les technologies de la finance, et l’IoT
Et lorsque les Chinois reprennent des applis existantes, ils les enrichissent dorénavant de nouvelles fonctionnalités. On évolue du “Made in China”, vers le “Designed in China”.
Chaque année, Huawei accompagne des start-up françaises à la découverte de l’écosysytème économique de la Chine. Nous avons rencontré dans ce cadre, la start-up Agorize qui se positionne depuis 2011 comme lien entre les entreprises et les innovateurs : étudiants, start-upeurs, développeurs, pour faire émerger de l’agilité et pousser les potentialités business.
Mathieu Toulemonde a relevé le défi de lancer le projet en Asie : « Depuis l’ouverture à Hong Kong il y a 18 mois, nous accompagnons une quinzaine d’entreprises, une aubaine dans un contexte business ultra dynamique, où agilité et rapidité sont les clés de la réussite.
Pour faire des affaires, il faut s’appuyer sur les fameux KOLs, les Key Opinion Leaders, tout en utilisant la force du Guanxi: « be friend, and then do business ».
Il conclut par cette information sidérante pour les entreprises françaises : « Avec nos clients, nous fonctionnons avec WeChat : le suivi commercial, les calls et même les devis sont envoyés par ce canal, devenu incontournable en Chine »
Arrêtons-nous justement sur Wechat, qui, pour les Chinois, est bien plus qu’une messagerie : un véritable mode de vie !
Citons We Chat Pay, l’une des sept sources de revenus de Tencent, que développe WeChat. Elle permet de réserver un taxi, payer une facture d’électricité, son addition au restaurant voire prendre un rendez-vous chez le médecin. Même les SDF l’utilisent pour faire la quête.
Avant-gardistes dans leur usage numérique, les Chinois sont 700 millions d’utilisateurs d’Internet : ils ont adopté depuis longtemps le QR code pour tout achat quotidien.
« Chaque Chinois utilise entre 3 et 4 devices, 80% de la consommation est réalisée sur mobile », précise Yvon le Renard, Managing Partner chez Clever Age Asia.
Shenzhen, épicentre de la high-tech mondiale
A une trentaine de kilomètres par la route, mais à une heure de trajet car la circulation est dense, avec le passage de la douane chinoise, se trouve Shenzhen, dans la région de Guangdong, moins connue en France que ne l’est Hong-Kong. En consacrant 4,3% de son PIB à la recherche et au développement de projets novateurs, elle est la ville la plus innovante de Chine.
Cette ville a été créée de toute pièce par le gouvernement, là siègent d’importantes entreprises chinoises, dont l’ancienneté ne dépasse pas trente ans, mais dont la croissance ébouriffe ! Dont Huawei, avec son ascension remarquable qui frôle la pôle position d’Apple en enregistrant 100 millions de ventes de smartphones depuis le début de l’année. L’Europe a été identifiée comme son second marché. Si l’on a pu rire des ambitions de Huawei, fondée en 1987, force est de constater que la marque se trouve maintenant au top niveau.
Dans le cadre de nos visites parmi les acteurs économiques en croissance : BYD, « Build Your Dreams” né en 1995, est devenu l’un des acteurs majeurs de l’automobile électrique au niveau international. Tencent, lancée en 1998, propose des services sur internet et les mobiles, des jeux vidéo et n’en finit plus de grimper à la Bourse de Hong Kong.
Ce sont des étudiants universitaires qui ont fondé DJI en 2006, maintenant leader du marché des drones grand public, qui emploie maintenant 8000 personnes.
Au centre de Shenzhen, le quartier de Hua Qiang Bei est emblématique de cette activité technologique.
C’est ici que se trouve le méga marché mondial de l’électronique, une sorte d’immense bazar B to B et B to C, regorgeant de produits, de composants tels que les condensateurs, les résistances, les connecteurs, les vis, les interrupteurs etc. Ici, chacun s’agite comme dans une ruche high tech …
Les jeunes enfants des vendeurs sont même endormis dans les poussettes devant chaque échoppe. Les parents ne sont pas inactifs, bricolant tout au long de la journée dans les câbles.
Le premier accélérateur hardware HAX, qui a vu le jour en 2011, se trouve opportunément quelques étages au-dessus de ce grand marché, au coeur de l’offre. Il permet aux 200 jeunes pousses qu’il accompagne, de travailler au workshop, et de venir se ravitailler à toute heure pour la réalisation de prototypage. HAX est désormais l’un des plus incroyables programmes de start-up pour les spécialistes du hardware (objets connectés, imprimante 3D) du monde.
En termes d’opportunités hardware, il faut noter qu’un mois à Shenzhen équivaut à trois mois dans la US Bay area !
Le point fort est justement cette gestion de la chaîne logistique, explique Cyril Ebersweiler, co-fondateur de Hax. Le changement qui s’opère ici est de taille, car la production manufacturière et industrielle d’envergure est telle, que les entreprises relocalisent leurs usines en Indonésie et au Vietnam, où les salaires des ouvriers sont plus bas.
A 25 ans, Laurent le Pen s’est installé ici. Il a d’abord fondé Omate, Wearable-as-a-Service, en 2013 : principalement de l’IoT et des wearable pour les gens qui ont besoin de protection. Il ne nie pas la difficulté de lancer un business en Chine sans appui et réseau, dans un marché très compétitif.
Conceptrice de logiciels et de hardware en B2B dans l’IoT, son entreprise affichait un chiffre d’affaires de 3 millions de dollars en 2016.
Il affirme : « Tout va plus vite pour les start up : on trouve des fournisseurs et des partenaires rapidement. » Sa stratégie ? Des éditions de produits limitées, à des prix attractifs.
Cet été il a lancé « OClean One » pour la prévention de l’hygiène buccale, un petit bijou de technologie : une brosse à dents électrique sonique et connectée, autonome durant 60 jours. Il en a vendu 50 000 en ligne depuis juillet et bientôt sur Amazon !
Entre Shenzhen, épicentre de la high-tech mondiale et Hong-Kong, moteur économique engagé au grand galop, parions que la Pearl River captera l’attention des entrepreneurs vers l’Est… car cette dynamique est contagieuse !
Photos : Copyright Fabienne Billat